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Les organisations porte-parole des travailleuse·eur·s de l’informel – chiffrés à plus de 2,1 millions dans le monde entier – appellent aux gouvernements à accélérer les investissements dans la protection des travailleuse·eur·s comme volet central des plans de relance économique.


Il y a un an, alors que se multipliaient les mesures de confinement dictées par la COVID-19, les travailleuse·eur·s de l’informel du monde entier ont perdu leurs moyens de subsistance et vu leur famille plonger dans une crise économique et la faim.

Dans le même temps, ces mesures ont mis en évidence le rôle essentiel que jouent tant d’entre eux dans la société, dont beaucoup de femmes, que ce soit en assurant des services tels que la collecte de déchets recyclables et le soin à la famille, ou en produisant des biens à destination des marchés locaux et en contribuant à la sécurité alimentaire par la vente de denrées à prix abordable. Lorsque contraints d’arrêter leur activité, il est apparu clairement à quel point que les travailleuse·eur·s de l’informel sont indispensables au fonctionnement des villes et des villages.

Au plus fort de la crise de COVID-19, en mai 2020, nous avons lancé aux gouvernements nationaux un appel les incitant à reconnaître le rôle essentiel que jouent les travailleuse·eur·s de l’informel dans l’économie locale et mondiale, à s’associer à leurs organisations pour s’assurer des approches solides des mesures de soutien et de redressement, à ne pas nuire, surtout en mettant fin au harcèlement sous toutes ses formes, à la violence et aux expulsions forcées.

Et pourtant, toute l’année, les travailleuse·eur·s de l’informel n’ont bénéficié que d’une aide publique limitée et éparse, sans compter que les gouvernements les ont exclu·e·s des plans et des politiques de relance et que la violence et le harcèlement se sont poursuivis dans de nombreux contextes.

Sur cette toile de fond, nous demandons instamment aux décideuse·eur·s politiques, alors qu’elles planifient la reprise économique, de prendre les mesures suivantes :

Investir dans les politiques propres à relier les travailleuse·eur·s à l’aide sociale, à l’assurance sociale inclusive et aux services de santé et de garde d’enfants

Les gouvernements doivent protéger – et non réduire – les dépenses consacrées à l’aide sociale, à l’assurance sociale et aux prestations sociales essentielles, à savoir les politiques et programmes qui protègent les travailleuse·eur·s et leur famille de la pauvreté, de la précarité et de l’exclusion.

Pour les aider à y parvenir, les institutions financières mondiales peuvent en finir avec les pratiques qui entraînent des mesures d’assainissement budgétaire nuisibles du fait qu’elles pénalisent indûment les travailleuse·eur·s, déjà en situation de pauvreté et vulnérabilité, et font réduire les dépenses publiques vitales.

Faire en sorte que les politiques de protection sociale et les protections au travail se conjuguent pour mettre les travailleuse·eur·s à l’abri de la pauvreté

La protection sociale, à elle-seule, ne peut compenser les inégalités résultant des politiques injustes et punitives qui aggravent les conditions de travail. Au lieu de promouvoir la flexibilisation des marchés du travail, pratique qu’il convient de cesser, les institutions mondiales doivent commencer à mettre en place des protections de base en faveur des travailleuse·eur·s salarié·e·s et indépendant·e·s.

Les travailleuse·eur·s ont tou·te·s droit à la négociation collective et le droit d’être présents à la table lorsque les gouvernements discutent des politiques qui vont toucher leur vie. Tout travail, y compris le travail informel, doit s’accompagner des protections liées à l’emploi afin que les travailleuse·eur·s puissent bénéficier d’un travail décent.

De leur côté, les municipalités, plutôt que d’expulser les travailleuse·eur·s de l’informel des espaces publics, une pratique à proscrire, doivent veiller à la sécurisation des moyens de subsistance, en particulier à l’endroit des femmes travailleuses de l’informel. En d’autres termes, elles doivent en faire une priorité, c’est-à-dire la protection des travailleuse·eur·s tout comme leurs moyens de subsistance, dans le cadre du processus de planification urbaine.

Bien entendu, il revient aux gouvernements et aux institutions multilatérales le devoir de responsabiliser les marques mondiales à l’égard du bien-être des travailleuse·eur·s, quelle que soit leur hiérarchie dans la chaîne d’approvisionnement, et de faire cesser les pratiques qui profitent des conditions de travail abusives, en particulier à l’égard des femmes qui travaillent à domicile en tant que « non-salariées dépendantes » sur les chaînes d’approvisionnement mondiales.

Reconnaître le rôle critique que les organisations de travailleuse·eur·s de l’informel ont joué dans l’effort de secours face à la COVID-19 et doivent jouer dans la relance de l’économie

Les organisations de travailleuse·eur·s de l’informel se sont révélées, face à la COVID-19, des acteurs indispensables sur le front des secours voulus. De la diffusion d’informations sanitaires vitales à la sollicitation de dons, en passant par la distribution de rations alimentaires, de masques et de désinfectant à mains, elles ont su mettre les travailleuse·eur·s en relation avec les secours alors que la crise sévit, et ce rôle vital doit être reconnu.

Pour ce faire, les gouvernements doivent faire participer les travailleuse·eur·s de l’informel aux instances décisionnelles clés, s’assurer du soutien financier aux organisations de travailleuse·eur·s de l’informel engagé·e·s dans la fourniture de services aux travailleuse·eur·s et soutenir celles qui ont apporté une aide précieuse à leurs membres lorsque les pouvoirs publics ont failli à leurs obligations.

Un an après l’éclosion de la pandémie, et alors que les gouvernements reconnaissent que les travailleuse·eur·s de l’informel sont essentiels à l’économie et à la société, à l’échelle tant locale que mondiale, il est urgent d’investir dans les prestations clés (aide sociale, assurance sociale, services de santé et garde d’enfants) pour que les travailleuse·eur·s de l’informel, chiffrés à plus de deux milliards dans le monde entier, puissent retrouver leurs moyens de subsistance maintenant et s’en assurer à l’avenir.
 

Les organisations soussignées, appartenant au mouvement mondial croissant des travailleuse·eur·s de l’économie informelle, représentent ensemble plus de 2,1 millions de membres dans le monde entier.

International Domestic Workers Federation (IDWF)
Elizabeth Tang, General Secretary

StreetNet International
Oksana Abboud, International Coordinator

HomeNet International
Janhavi Dave, International Coordinator

Global Alliance of Waste Pickers
Soledad Mella, Samuel Samzao and Jerry Johnson, Waste Picker Leaders

Technical Support
Women in Informal Employment: Globalizing and Organizing (WIEGO)
Sally Roever, International Coordinator